L’autorail Panoramique Renault X 4200 et ses reproductions Jouef en HO
L’autorail X 4200 est un autorail panoramique à voie normale. Cet automoteur à deux niveaux fût construit en 10 exemplaires numérotés X 4201 à 4210. La structure de l’autorail panoramique X 4200 avait la particularité de comporter une cabine surélevée de première classe, située dans la partie centrale, au-dessus du compartiment moteur. Elle offrait une vue à 360 ° par tous les temps grâce à un dispositif anti-buée constitué de résistances électriques encastrées dans les fenêtres.
Il s’agit d’un autorail réversible, équipé de deux cabines de conduite (une à chaque extrémité). L’autorail X 4200 était équipé de deux bogies de 2 essieux, dont un moteur et un porteur. Sa ligne était due au styliste Paul Arzens qui l’avait revêtu d’une livrée rouge et crème avec un toit et un seuil gris anthracite. Cette livrée appliquée dès 1959 que ces autorails conserveront, fait rare, jusqu’à leur décommissionnement dans les années 80. La série a été construite par la branche ferroviaire de la Régie Nationale des Usines Renault (« RNUR ») dans son usine de Choisy-le-Roi.
L’aspect de ce véhicule avec ses compartiments extrême et son dôme central avec vision panoramique le rend tout à fait exceptionnel. Le dôme central panoramique est surélevé sur le compartiment moteur et le coffre à bagages, au centre, et encadré de deux plateformes. Sa capacité est de 88 passagers dont 44 en 1ère classe (dans le dôme central surélevé); et 44 en 2e classe (dans les compartiments extrêmes) dont 8 places sur des strapontins rabattables. Le chauffage pour la 1ère classe est à air forcé et assuré par des appareils de chauffage à air chaud pour la seconde classe. Les fauteuils de première classe, situés sous le dôme supérieur, sont réglables pour pouvoir être tournés dans le sens du déplacement. Ces machines étaient équipées d’un système de ventilation par ventilateurs électriques, indispensable pour maintenir une température acceptable sous le dôme du compartiment de première classe. Une vraie climatisation était prévue mais elle n’a été installée que sur le premier exemplaire de la série (X 4201) et uniquement pour la première classe.
Les sièges de la deuxième classe sont situés dans les deux compartiments situés au niveau inférieur, à l’avant et à l’arrière, séparés par le compartiment moteur et le compartiment bagages du centre. Les passagers de la deuxième classe peuvent voir la voie en avant (ou en arrière dans l’autre compartiment), les cabines de conduite n’étant isolées que par un mur de verre. Deux paires de sièges de seconde classe sont situés très en avant, à côté de la cabine du conducteur.
Au centre, le compartiment surélevé de première classe était séparé du compartiment moteur par un plancher isolant de 13 cm d’épaisseur, qui assurait une protection thermique et acoustique. La laine de verre et l’amiante complètent la protection thermique et la protection contre le feu. Le dôme était composé de 4 éléments en polyester stratifiés de 3,50 m de long et 2,80 m de large pour un poids de 780 kg seulement. Les fenêtres du dôme avec leurs joints pesaient 1000 kg. Le verre externe utilisé pour le dôme est de type Athermic, c’est-à-dire partiellement imperméable au rayonnement infrarouge.
La propulsion consistait en un moteur MGO de type « V12SH » de la Société Alsacienne de Constructions Mécaniques (SACM) équipé d’un turbo « Napier » du type HP 100. Le moteur était similaire à celui du X 2800 (livré à partir de mai 1957) mais légèrement moins puissant avec 480 kW, soit 800 chevaux (au lieu de 825 ch pour X 2800). Les réservoirs au nombre de 3 contenaient 1500 litres de gasoil et étaient munis d’un dispositif de réchauffage. Des problèmes de refroidissement dans le compartiment moteur – trop petits – ont rapidement conduit à limiter sa puissance à 600 ch en service commercial. La transmission était électrique, le moteur diesel entraînant un générateur électrique, lui même fournissant leur énergie à deux moteurs placés sur les essieux et alimentés sous une tension de 1 000 V. L’autorail panoramique pourrait voyager en formation jumelée de deux machines ou remorquer une ou deux remorques.
Grâce à l’utilisation de plastique pour le dôme, les réservoirs, les escaliers et l’adoption de faces latérales constituées d’une poutre triangulée classique, le X 4200 n’a pas dépassé la charge de 16,5 tonnes par essieu ce qui lui a permis de circuler sur la majeure partie le réseau ferré français.
Réforme et classement
La fin du service sur Genève, puis la perte du Cévenol en 1976 porta un coup fatal à ces autorails. La réforme a débuté en 1980 (X 4201 et 4205 radiés) et se poursuit jusqu’en 1985, ou le service d’hiver 84-85 sera leur dernier roulement. La SNCF met en vente quatre de ses autorails, dont les 4204, 4206 et 4208 au prix de 110 000 francs pièce de l’époque. L’un d’entre eux, le 4210 est utilisé pour un exercice d’incendie le 17 mars 1985 et brûlé par les pompiers à St. Cézaire [1].
Après leur retrait du service, certains autorails panoramiques ont été conservés: le X4203 réservé au musée du chemin de fer français à Mulhouse, le X4206 utilisé en été sur la ligne touristique Saint-Jean-du-Gard – André. Le X4208 acheté par l’Association des amis du musée de l’agriculture et de la machine à vapeur (AGRIVAP).
Pendant longtemps, un des X 4200 SNCF acquis par une association (la CITEV) est resté garé en Gare de Tournon, sur le faisceau alors utilisé par le Chemin de Fer du Vivarais. L’auteur l’a observé avec sa livré d’origine rouge et crème en 2005. Il était alors en mauvais état et à vendre.
Finalement, grâce au travail de l’AGRIVAP, un total de 4 X 4200 on été conservés: 2 sont restaurés et un troisième – le 4206 – devrait être restauré avec les pièces du 4203. Notons que l’un des autorails est inscrit à l’inventaire des monuments historiques [2].
- X 4204 : confié à la Régie Renault et classé au titre objet des monuments historiques le 11 février 1998.
- X 4203 : récupéré par Agrivap en 2001, ses pièces vont servir à la restauration du X 4206.
- X 4206 : ex-CITEV, récupéré par Agrivap en 2005, doit être restauré avec les pièces du X 4203.
- X 4208 : restauré en 1986 par Agrivap, roule depuis pour le Train touristique du Livradois-Forez. Repeint dans la livrée spécifique de cette association, les véhicules de série arboraient la livrée classique rouge et crème de la SNCF.
Services effectués
Les X 4200 ont assuré à partir de 1959 des dessertes sur les lignes du réseau Sud-Est de la SNCF avec en particulier les deux trains touristiques célèbres « Le Cévenol » (via la ligne des Cévennes) et « l’Alpazur » (via la ligne des Alpes).
Les X 4201 à X 4204 ont circulé à partir du 31/05/1959 et on assuré le célèbre train « Le Cévenol » Marseille – Nîmes – Alès – Clermont-Ferrand – Le Mont-Dore. Sur le « Cévenol », ils étaient souvent associés à un X 2400 puis un X 2800 encadrant deux, voire trois remorques. Ces jumelages et remorquages entraînaient une limitation de vitesse à 120 km/h . En 1978, le « Cévenol » perdit ses autorails panoramiques aux profit d’X 2800 modernisés puis d’une rame Corail tractée par BB 67400 . Les X 4205 et X 4206 ont effectué le 31/05/1959 le 1er train « Alpazur » entre Genève et Digne via Grenoble. Ce train périodique d’été (de juin à septembre) nécessitait chaque été le détachement au Centre Autorails de Grenoble de quatre autorails X 4200 marseillais de 1959 à 1971. Lors de leurs séjours dans la capitale des Alpes et du Dauphiné à Grenoble les X 4200 assurèrent aussi quelques relations Aix-les-Bains – Chambéry – Grenoble – Valence (et retour) et Grenoble – Genève (et retour). Ils tractaient une à deux remorques. Sur l' »Alpazur », ils étaient souvent associés à un X 52000, X 52100 ou X 2400 encadrant deux, voire trois remorques. Les X 4200 ont également circulé, entre autres, sur le littoral languedocien (Marseille – Cerbère), sur la Côte d’Azur (Toulon et Nice), sur la ligne de la Côte bleue et dans le briançonnais. En fin de carrière, ils effectuèrent quelques rotations sur Alès et Bessèges et Alès – Génolhac.
Les modèles réduits
Un temps uniquement reproduit par Jouef et très prisé d’occasion après la faillite car introuvable chez d’autres fournisseurs, le panoramique a fait l’objet de reproductions récentes et de qualité.
Les modèles Jouef X 4200 référence 8520 et 8605
Dans son ouvrage sur Jouef, Clive Lammings nous rappelle que les modèles Jouef étaient essentiellement commercialisés dans leur région d’opération, et mentionne notamment que le X 4200 était surtout vendu en Rhône Alpes. C’était pourtant un modèle très original et somme toute assez rare. L’autorail X 4200 Jouef existera en deux versions. La première ajoutée au catalogue en 1966 reprend la mécanique de propulsion par bloc moteur 12 volts 3 pôles et essieux intégré déjà mise en oeuvre sur les Picasso.
La seconde édition, mise sur le marché en 1983, revue et corrigée, bénéficie d’une motorisation améliorée, d’une gravure légèrement plus fine, et d’une traverse avant avec un crochet plus réaliste. Le principe du bloc moteur avec bogie demeure mais est remplacé par le 12 volts 5 pôles commun aux RTG/X 4700/X 4900/X 3800 et Z 5100 SNCF de la marque. Le moteur n’est plus alimenté par captage sur essieux moteurs mais par captage sur l’autre paire d’essieux non motorisée, ce qui permet de bandager l’essieux de traction. De manière générale les modifications apportées à la mécanique et au captage de courant améliorent considérablement ce modèle. En plus de la sérigraphie d’une plaque Genève-Nice existante, est ajoutée l’inscriptions sérigraphiées « SNCF 34 T-X 4203 » (rouge sur fond jaune) sur les flancs avant de la caisse. Les essieux sont brunis et de taille plus réaliste. L’éclairage est également supprimé.
Les deux versions du modèles conservent un dessous de caisse assez peu détaillé avec deux réservoirs, l’inscription Jouef marque déposée, et la référence 852. En pratique le modèle panoramique reçût cette référence à sa sortie puis pris la 8520 et 852E, avant de recevoir la référence 8605 pour la version modernisée. Il ne faut donc pas tenir de la référence du châssis pour identifier une version du modèle. On trouvera les premières versions en parfait état et boîte d’origine pour 60 à 80 euros, et un peu plus cher pour les deuxièmes versions, plus fiables et un peu plus rares.
Les autres modèles, Mistral et Brassline
L’ancienne gamme Jouef est une source d’inspiration pour de nombreux fabricants, surtout lorsque la firme Hornby (propriétaire désormais de la marque) n’a pas commercialisée à nouveau le produit. La marque Mistral s’est ainsi lancée dans la reproduction de l’engin compliqué qu’est le X 4200 avec ses vitrages galbés et sa structure panoramique. Le modèle offre un fonctionnement impeccable et une silhouette très fine et détaillée. L’aménagement intérieur est complet, comme sur tous les modèles de cette gamme de prix, mais certains acquéreurs on critiqué la qualité du plastique et des assemblages. Les versions X 4207 et X 4210 (celui détruit par un incendie) ont été offertes à la vente, ainsi qu’une version du panoramique vert Agrivap. Les trois versions ont toutes trouvé preneur pour 300 à 350 euros et ont été livrées fin 2017.
Le fabricant Brassline [5] qui a commercialisé entre 2007 et 2014 de très beaux modèles HO a également développé une très belle reproduction de l’autorail X 4206 ainsi que du X 4208 en livrée AGRIVAP. Ce modèle en laiton extraordinairement détaillé se trouve – très rarement – en vente pour des prix dépassant généralement les 1000 euros.
[1]Notes & Sources
Sources ;
[1] http://doctrain.centerblog.net/39-x-4200-panoramiques
[2] http://www2.culture.gouv.fr/public/mistral/palissy_fr?ACTION=CHERCHER&FIELD_1=REF&VALUE_1=PM78001092 Note de classement
[3] http://pierre-roubinet.pagesperso-orange.fr/compositcar/panoramiq.htm
[4] http://www.mistraltrains.be/fr/22-autorail-renault-x-4200
[5] https://loco-ho.com/brassline.html
Dépots titulaires du Panoramique X4200
- Marseille-Saint-Charles (de 1959 à 1960) avec détachement pendant l’été de plusieurs engins au Centre Autorails de Grenoble pour la relation « Alpazur »
- Marseille-Blancarde, (de 1960 à 1982, puis transfert à Nîmes le 23/05/1982) avec détachement pendant l’été (jusqu’en 1975) de plusieurs engins au Centre Autorails de Grenoble pour la relation « Alpazur »
- Nîmes (du 23/05/1982 au 01/06/1985, avec les X 4202, X 4204, X 4206, X 4207 et X 4208, les autres ayant été réformés auparavant)
Merci Mister E pour tes articles précis et documentés : un vrai régal pour les ferrovipathes de tous bords ! Ce beau reportage sur les panoramiques de la SNCF est bienvenu en écho à celui des Skyline de Via rail : même concept, qui me semble pérenne et que je regrette de ne plus trouver en France… Tes descriptions et les photos ravivent bien des souvenirs.
J’ai eu le plaisir de voyager souvent dans des X4200 (hélas en 2è classe), notamment sur la relation Chambéry -St Gervais le Fayet, via Aix, Annecy (un modèle égaré à Grenoble en hiver et qui faisait un peu le bouche-trou ?). Un émerveillement pour moi, mais c’était déjà un peu déglingué, surchauffé, embué, entassé (44 places, c’est peu !), sans la « pêche » des X2800.
Étant enfant, j’ai joué avec un modèle réduit JOUEF (le 8520!!) chez un ami chanceux, très fier d’exhiber son cadeau de Noël. Avions-nous conscience de côtoyer des mythes ?
Merci Christian !